Paris, 12 mai 2025 — C’est elle qui a ouvert la soirée. Avant qu’Ajaz ne monte sur scène pour son premier concert solo, Jeanne Bocca s’installe seule, guitare en main. Elle ne dit presque rien, mais tout passe dans le timbre de sa voix, dans ses gestes mesurés, dans ce calme qui prend la salle de court.
Jeune chanteuse multi-instrumentiste, elle alterne guitare et clavier avec une aisance naturelle. Mais ce qui frappe, au-delà de la technique, c’est ce mélange rare de douceur maîtrisée et de sens du rythme instinctif. On sent chez elle une musicalité intérieure, quelque chose de profond et de limpide, qui ne cherche pas l’effet mais touche directement.
Son chant n’est jamais forcé : il glisse, s’élève, retombe en lumière tamisée. Il y a de la pudeur, mais jamais de distance. La sensibilité est visible, nue, offerte sans fard. Une vibration retenue qui résonne longtemps après la dernière note.
Plus tard dans la soirée, Jeanne rejoint Ajaz, son frère — Albin Selimi de son vrai nom — pour un moment suspendu. Ensemble, au milieu du public, ils chantent à cappella “Eja, eja lule borë”, un chant traditionnel albanais. Leurs deux voix s’entrelacent dans une épure émouvante. Rien à prouver, juste à transmettre. Une tendresse fluide, un hommage vibrant à leurs racines communes, eux qui sont nés en France, de mère française et de père albanais.
Et puis, il y a ce moment de grâce : Jeanne quitte le micro pour danser, portée par le rythme comme par un souffle. Une danse libre, une façon d’habiter la musique autrement, par le corps. C’était bref, mais lumineux. Comme une vérité qui passe sans explication.
Dans cette salle comble du POPUP, ce 12 mai 2025, Jeanne Bocca n’a pas seulement ouvert un concert. Elle a ouvert un espace d’écoute, un endroit subtil entre silence et vibration. Et ce soir-là, elle l’a occupé avec une justesse qui ne s’oublie pas.