Edi Rama sa carrière politique dans l’angle de son livre Kurban

Interview avec Edi Rama, actuel Premier Ministre Albanais – à l’époque, le premier secrétaire du parti socialiste albanais – sur sa carrière politique dans l’angle de son livre Kurban.

Pendant son séjour à New York, 16 mars, 2012

KLARA BUDA

KBP- Dans la société albanaise fatiguée par le Statu Quo vous vous présentez comme un facteur apte d’apporter le changement. Comment allez-vous satisfaire cette soif de changement ?

ER-Nous allons faire toute ce qui est possible pour créer les conditions nécessaires pour une renaissance albanaise, pour faire en sorte que non seulement le gouvernement change, mais aussi que la politique change. Fondé dans a nouveau programme, nous ferons en sorte de changer la façon de gouverner. Nous sommes conscients que pour permettre le changement il faut changer non seulement le comportement, mais aussi l’exemple de ceux qui  gouvernent.

KBP-Dans votre premier mandat vous avez effacé la couleur grise qui dominait les façades de Tirana la remplaçant par des couleurs vives. Quel était le porté politique de cet acte ?

ER-Le changement de Tirana est arrivé quand les conditions pour ce changement étaient réunies. Les couleurs étaient qu’un catalyseur de ce changement qu’au-delà d’un geste esthétique constituaient un mécanisme politique peu couteux dans le but de donner des ailes aux grandes transformations changeant l’approche des citoyens envers leur ville et ressuscitant la croyance perdue pour faire renaitre un espoir qui n’avait plus de place dans Tirana de cette époque.

KBP-Un de vos importantes actions du premier mandat était aussi le nettoyage des constructions illégales au bord de la rivière Lana à Tirana. Cela vous a confronté avec des pratiques illégales soutenues par des puissants groupes locaux. Mais dans votre deuxième mandat vous étiez accusé de clientélisme. Il semble difficile d’avoir un avenir politique en Albanie sans composer avec ces structures ?

ER-Je ne crois pas que les accusations concernant la Mairie de Tirana – et il y en avait beaucoup – étaient fondées. Ses accusations étaient liées avec l’intérêt du pouvoir et non avec celui du public. Contrairement à ces accusations, les faits parlent clairement en faveur du fait que la Mairie de Tirana n’étaient pas une institution clientéliste, mais une institution ouverte et moderne ou travaillaient des femmes et des hommes responsables, respectueux des lois et passionnés par la ville. Je ne peux qu’être fière de cela. Et si’ il y avait des défauts, ils étaient des défauts d’un processus normal de transformation et de développement de cette institution.

KBP-Aucun regret pour le deuxième mandat ?

ER-Le contexte politique avec des pressions politiques continues exercées à la Mairie de Tirana par un gouvernement réfractaire envers nos projets et à l’intérêt public. Et, bien sûr, les restrictions budgétaires imposées par le gouvernement à la Mairie de Tirana, qui ont empêché la réalisation de nos projets.

KBP- Pourtant, pendant votre premier mandat, le gouvernement de droite de Ilir Meta vous a aidé dans votre initiative de changer la face de Tirana ?

ER-Oui. J’ai parlé de cela dans mon livre [1]. Tout ce qui se passe actuellement après les accusations contre Ilir Meta et malgré son avenir politique incertain aujourd’hui, le fait est qu’avec son gouvernement, qui était aussi le premier gouvernement avec lequel j’ai collaboré dans le rôle du maire de Tirana, nous avons fait un travail important pour Tirana.

KBP- Vous n’avez aucun regret pour votre deuxième mandat, mais vous regrettez la proposition du changement des lois, dont vous étiez à l’origine ? 

La validation en 2008 de ces lois accroîtra le pouvoir autoritaire de l’État.

ER-Pour être vraiment sincère, je ne pense pas que les changements qui ont été faite dans leur ensemble ont eu une influence négative ou ont accentuée l’autorité du pouvoir.

KBP-Mais après un certain nombre de pratiques du parti ou pouvoir vous avez demandé l’annulation de ces changements. Peut-être au moment de la proposition, vous n’avez pas mesuré la vraie portée de ces changements ?

Bien sûr que nous aurions dû être plus attentifs pour mesurer les risques liés à une partie des changements. Pour cela, je n’ai pas manqué de dire mon avis et aujourd’hui je considère ces changements erronés. Mais si elles ne sont pas adéquates, cela est lié aux conditions actuelles de l’Albanie et non en général, ils ne sont pas erronés en soi. Je pense aussi qu’il y a une perception exagérée du mauvais effet de ces changements.

KBP-Votre troisième mandat est considéré comme un mandat pendant lequel la Mairie de Tirana est délaissé pour le compte du parti Socialiste dont vous étiez le premier secrétaire. Si vous aviez la possibilité de refaire ce mandat, qu’est-ce que vous auriez changé ?

ER-Je ne changerai rien dans les conditions que le gouvernement de l’époque a manqué son devoir et a fait tous ce qui était en son pouvoir pour bloquer l’action de la Mairie de Tirana, pour pouvoir dire en suite, que j’avais délaissé la Mairie de Tirana pour m’occuper de la direction du parti socialiste. Je n’ai jamais négligé la Mairie de Tirana et le travail pour la ville. Ce travail était fait aussi grâce a une équipe formidable et rodée qui avançait sans le besoin d’être suivie chaque minute de chaque jour.

KBP-Dans les années 90, pendant votre séjour à Paris, vous étiez très critique envers la présence dans le gouvernement démocratique des ex-membres du parti du travail (ex communiste). Paradoxalement aujourd’hui vous êtes à la tête du parti socialiste albanais, héréditaire du parti du travail, alors que le parti démocratique était dirigé pour deux décennies par un ex-secrétaire du parti du travail. Il paraît qu’en Albanie être de droite ou de gauche ne veut plus rien dire ?

ER-Cela est seulement une symbolique, mais au-delà de cette symbolique, je dirais qu’il y a une différence essentielle entre  le parti socialiste et le parti démocratique concernant la perception de la liberté et des principes démocratiques. Aujourd’hui le parti socialiste est un parti ouvert, un parti qui ne cache pas qu’il a des problèmes, mais qui les discute comme faisant partie d’un processus normal de développement.  De l’autre côté le parti démocratique est un parti qui non seulement ne fait rien de tout cela, mais au contraire est l’exemple de ce qu’un parti démocratique ne doit pas être.

Et c’est un fait, le parti démocratique est dirigé par un ex-secrétaire du parti du travail alors que le parti socialiste est dirigé par quelqu’un qui n’a jamais été un membre du parti du travail et qu’à partir un moment précis était ouvertement contre le parti du travail.

KBP- Parlons un peu de votre prochaine étape, de votre prochaine conquête. J’ai vu votre livre « Kurban », comme une métaphore de l’espoir. Comme si vous disiez : je peux changer la face de l’Albanie comme j’ai changé la face de Tirana. Ai-je tors ?

ER-Je suis content qu’un écrivain ait lu mon livre comme une métaphore de l’espoir. Une des choses que ce livre dit sans que je l’exprime explicitement est que de la même façon que la face de Tirana a changé dans un moment où personne ne l’attendait, la face de l’Albanie peut changer aussi quand une force remplie d’énergie positive peux faire en sorte que cela se passe.

Suite disponible on vidéo

[1] Le livre Kurban