Paris, le 16 octobre, 2025.
C’est un jour froid d’octobre.
Je regarde par la fenêtre,
cigarette lente entre mes doigts,
et déjà l’air sent Noël,
comme si l’année avait glissé sans moi.
Je ne l’ai pas vue passer.
Les saisons s’effacent
comme de brèves journées grises.
Je viens de finir la thèse sur mon roman —
des années à creuser l’absence,
à mettre en mots ce que le silence contient.
Je suis docteure en philosophie !
Et pourtant,
je n’ai jamais été aussi proche du néant.
Une thèse sur l’exil —
celui que l’on subit,
et celui que l’on porte en soi.
Depuis, je me sens déjà morte,
suspendue à ce texte
que je réécris sans fin.
Il ne sera peut-être jamais publié.
Pas de mon vivant.
J’habite un pays
que mes mots laissent froid.
Ils tombent, muets,
comme la pluie sur du verre.
Mon existence, aussi,
semble n’appartenir à personne.
Je vis ici,
mais sans place,
sans langue qui m’accueille vraiment.
Et pourtant,
tout ce que je suis
tient dans ces pages invisibles.
J’ai un désir impossible :
revenir d’entre les morts
le temps d’un seul jour,
juste pour voir ce roman
exister.
Ce rêve me semble injuste.
Peut-être même…
une vanité.
Mais je n’en ai pas d’autre.
Pourtant, c’est là tout le paradoxe :
publier ce livre
qui me garde en vie.
Rilke dirait
que c’est le seul rêve possible.
© Klara Buda